jeudi 29 avril 2010

Les français sont vraisemblablement plus nombreux à connaître le nombre de minarets en Suisse (quatre) et de "burqas" en France (trois cent soixante-sept [1]) qu'à savoir que le Trésor public a perdu 20 milliards d'euros à la suite d'une décision "technique" de l'exécutif.

Il y a dix-huit mois en effet, au lieu de subordonner son sauvetage des banques en perdition à une prise de participation dans leur capital, laquelle ensuite aurait pu être revendue avec un joli bénéfice, le gouvernement français a préféré leur consentir un prêt à des conditions inespérées... pour elles. Vingt milliards d'euros de gagnés pour leurs actionnaires, c'est presque autant que le déficit de la Sécurité sociale l'an dernier (22 milliards d'euros). Et quarante fois le montant de l'économie annuelle réalisée par l'État lorsqu'il ne remplace qu'un fonctionnaire partant à la retraite sur deux.

Le rétablissement électoral du Front national, et plus généralement de l'extrême droite en Europe, n'est pas tout à fait étranger à cette distribution de l'attention publique entre la poutre des polémiques subalternes qu'on enflamme et la paille des sujets prioritaires dont on prétend qu'ils sont trop compliqués pour le commun des mortels. Le fiasco des élections régionales derrière lui, M. Nicolas Sarkozy va s'attaquer à la "réforme des retraites". L'enjeu social et financier étant considérable, on sait déjà que le gouvernement français s'emploiera à distraire la galerie en relançant le "débat sur la burqa".

Riposte à cette manoeuvre n'impose certainement pas de s'enfoncer sur son terrain boueux en donnant le sentiment de défendre un symbole obscurantiste. Encore moins de taxer de racisme les féministes -hommes et femmes- qui légitimement le réprouvent. Mais comment be pas juger cocasse qu'une droite qui a presque partout associé son destin à celui des Églises, du patriarcat et de l'ordre moral se découvre soudain éperdue de laïcité; de féminisme, de libre-pensée? Pour elle aussi, l'Islam accomplit des miracles!

En 1988, M. Georges H. W. Bush succéda à Ronald Reagan après une campagne d'une démagogie insigne, au cours de laquelle il réclama que soit criminalisé le fait de brûler la bannière étoilée -un acte commis entre 1 à 7 fois par an... Avec le courage qu'on imagine, plus de 90% des parlementaires américains adoptèrent une disposition répressive allant en ce sens- laquelle fut annulée par la Cour suprême. Au même moment éclatait l'un des plus grands scandales de l'histoire économique des Etats-Unis, celui des caisses d'épargne déréglementées par le Congrès, que des aigrefins avaient pillés, enhardis par des sénateurs dont ils avaient financé les campagnes. En 1988, nul ou presque n'avait évoqué le péril d'une telle arnaque, bien qu'il fût déjà connu. Trop compliqué, et puis la défense du drapeau occupait les esprits.

Le contribuable américain a payé 500 milliards de dollars le scandales des caisses d'épargne. On découvrira bientôt ca que cache réellement la "burqa". Et combien cela coûte.

Serge Halimi Le monde diplomatique

(1) D'après un calcul, étrangement précis, de la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI)

1 commentaire:

  1. N'est ce pas.

    Et c'est là qu'on se pose la question de quel est la logique dans tout ça ?
    Je ne peux pas croire que son SEUL profit puisse etre la seule motivation de nico-dido !

    Le débat sur la burqa, moi ça me fait bien rire. Qu'est-ce que cette histoire loufoque ? Et le ptit chapeau des juifs ?
    Non parce que moi je veux savoir qui se cache derrière cette barbes et ces rouflaquettes !
    Ha non, politiquement incorrect, Shoah tout ça tout ça...

    Merci pour ces articles en tout cas ma poule,
    Biz, jasmine

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